Lire les gènes du fœtus dans le sang materne

Vendredi 10 Décembre 2010

LE FIGARO - Sandrine CABUT

Lire les gènes du fœtus dans le sang materne

À l'avenir, une prise de sang chez la mère permettra de détecter des maladies génétiques et de remplacer les amniocentèses.

GÉNÉTIQUE Tout savoir du génome d'un fœtus grâce à une simple prise de sang chez sa mère. C'est la prouesse technique réussie par l'équipe sino-américaine du Pr Dennis Lo (université chinoise de Hongkong), qui vient de publier un article dans la revue Science

Translations Médiane. Ces résultats, préliminaires puisqu'un seul profil génétique a été analysé, démontrent en tout cas, selon ces chercheurs, que « le génome fœtal est intégralement présent dans le sang de la mère ». De nombreuses maladies génétiques pourraient donc ainsi être recherchées de façon non invasive, assurent-ils.

Jusqu'à présent, en période prénatale, le diagnostic de certitude de ce type d'anomalies repose sur des prélèvements fœtaux : biopsie de trophoblaste (ébauche du placenta) au premier trimestre, ou amniocentèse au deuxième trimestre. Mais ces techniques fiables

Sont responsables de fausses couches dans 1% des cas. En 1997, le Pf Dennis Lo s'était illustré en mettant en évidence de l'ADN circulant dans le sang maternel. Depuis, plusieurs équipes se sont lancées dans cette voie de recherche, pour mettre au point des tests dont le principe commun est d'analyser le matériel génétique fœtal dans le sang maternel. Ces travaux, qui bénéficient des progrès des appareils de séquençage à haut débit, sont assez avancés dans certaines affections comme les trisomies.

Pour reconstituer un génome fœtal, l'équipe du Pr Lo a étudié un couple qui consultait pour un diagnostic prénatal de bétathalassémie, une forme grave d'anémie liée à un défaut de synthèse de l'hémoglobine. Les deux futurs parents étant porteurs d'un gène muté, l'enfant à venir avait un risque sur quatre d'être malade. Parallèlement à la biopsie de trophoblaste, les chercheurs ont réalisé des analyses sanguines chez les deux membres du couple. Grâce à des séquenceurs puissants, ils ont scruté pas moins de 4 milliards de molécules d'ADN chez la mère, dans le but d'identifier celles appartenant au fœtus. En comparant les échantillons paternels et maternels en 900000 points, le génome fœtal a été reconstitué. «C'est une performance technique remarquable, obtenue par une équipe de pointe. Mais on est loin d'une application en routine », estime le Pf Yves Ville (hôpital Necker, Paris), dont l'équipe évalue actuellement une méthode de recherche de la trisomie 21 par analyse de l'ADN fœtal dans le sang maternel.

Pas d'application concrète avant plusieurs années Le Dr Jean-Marc Costa (Hôpital américain de Neuilly) est plus critique sur la présentation des résultats du Pr Lo, qu'il juge racoleuse. Selon ce spécialiste (pionnier en France de l'utilisation des examens d'ADN fœtal dans le sang maternel pour la détermination du sexe et du rhésus D), «ces chercheurs amènent une preuve de concept, mais ils ont recours à un séquençage massif, une technique très compliquée dont le format semble peu compatible avec les laboratoires de diagnostic prénatal».Dans le meilleur des cas, ces travaux n'auront pas d'application concrète avant plusieurs années. Reste aussi à savoir quelles maladies pourraient être ainsi diagnostiquées : myopathies, maladies métaboliques...

«C'est la même question qu'avec les examens d'aujourd'hui, ce n'est pas parce que c'est faisable qu'il faut rechercher tous azimuts », remarque le Pr Ville.

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